Sauvetage !!!

Si on lui avait dit qu’il referait exactement le même chemin, il n’aurait pas prit la peine de sortir de sa cellule !
L’indic’ les avait informé que Greev avait sans doute été reconduit dans sa cellule, sous bonne garde cette fois. Ils devaient donc remonter les escaliers et se repérer dans les couloirs du 3ème étage. Et au vu de la tête d’ahuri du dénommé Mario, ce serait à Grisom de guider leur trio.
Il avait espérer un instant sortir de la base et respirer un bon bol d’air frais mais Jim n’avait pas les mêmes projets pour lui. Il devait les aider à retrouver leur compagnon avant de quitter la base.

« En avant alors. On traverse la cuisine comme si de rien n’était, les cuistots sont trop occupés pour nous prêter attention. Après il faudra marcher d’un bon pas, la base est encore en niveau d’alerte. »

Il ramassa son fusil, ouvrit la porte du garde-manger et se retrouva quelques instants plus tard dans le couloir. Grisom prit la direction des escaliers, rassuré d’entendre les pas de ses camarades.

*Mais qu’est ce qui m’a pris dans la réserve…? Bon ok, j’avais faim… mais quand même ! Je n’ai même pas eu la force de m’arrêter. Et ce goût ! Ce parfum ! J’en mangerais bien encore des tonnes, si seulement je savais de quoi il s’agissait…*

Ces pensées culinaires furent interrompues lorsqu’ils parvinrent au deuxième palier.
En effet, de l’autre bout du couloir leur parvenait les bruits étouffés d’un combat. Ils s’arrêtèrent quelques instants, tendus, afin de s’assurer que la bataille ne se dirigeait pas vers eux. Le forgeron se retourna vers son capitaine, qui indiqua les marches d’un signe de tête.

« D’acc Jim. Mais j’espère qu’il s’en sortira sans trop de bobos. Enfin, on continue ! »

Et ils s’engagèrent dans la dernière volée de marches qui les amena au troisième étage. L’ancien prisonnier les mena sans soucis vers les cellules d’où il s’était échappé, il s’arrêta cependant à quelques mètres de l’embranchement.

« Je vais voir comment ça se présente. Je vais tenter de ne pas me faire voir, mais si vous entendez des bruits de baston n’hésitez pas à venir m’aider hein. »

Il se glissa alors silencieusement vers l’angle du mur, s’accroupit et se pencha pour évaluer la garde qui devait se trouver dans le couloir.

Le forgeron se retourna vers ses compagnons qui attendaient en silence.

« Aucun garde en vue. On y va Jim ? »

Le capitaine prit quelques instants pour répondre, passant son regard pénétrant sur ses deux aides, comme s’il essayait de les évaluer. Grisom ne savait que penser de ce personnage. Il ne faisait aucun doute qu’il avait des dispositions de leader. Sa démarche, son maintient, son regard scrutateur, tout cela trahissait une habitude à être obéit.
Et puis il avait ce maintient de tête, toujours droite même dans la tourmente, comme si il refusait de s’incliner face aux évènements.
De plus, Jim était loin d’être une tête brûlée, il savait prendre des décisions réfléchies même en pleine pagaille, Grisom l’avait remarqué lors de l’incident avec Bayface.

*Est-ce que je peux lui faire confiance ? Placer mes espoirs sur lui ? Je voulais faire un bout de chemin avec eux puis passer sur un navire plus important mais… Je ne pensais pas qu’un gars de sa stature se trouvait dans West Blue.*

Grisom ne savait que faire, devait-il s’allier pour de bon à ce mystérieux personnage ?
Pour lui cette question avait une vraie signification : s’il s’engageait auprès de Jim Hawkins, plus question de le quitter. Le sens de l’honneur était une des rares choses que sa défunte mère lui avait légué, sa voix résonnait encore clairement dans son esprit :

« Ne donne jamais ta parole sur un coup de tête mon fils, car il n’y a pas de demi-mesure quand l’honneur d’un homme est en jeu. Et ne rejoins jamais les briseurs de serments, ceux-là sont les pires engeances que tu puisses rencontrer. »

La sentence maternelle le poussa à calmer son enthousiasme, il attendrait d’en apprendre un peu plus sur Jim avant de lier son sort au sien.

« Mario reste ici monter la garde, préviens-nous si une patrouille arrive. Grisom avec moi, on va fouiller les cellules. »

Les ordres de l’homme masqué furent immédiatement exécutés. Les deux hommes s’enfoncèrent dans le couloir, jetant un regard sur le coté chaque fois qu’ils passaient devant une cellule.

L’ambiance de ce couloir ne plaisait pas du tout à Grisom. Il était trop froid, l’air était trop dense, charriant une odeur de pourriture humaine qui agressait ses narines.
Il n’avait pas remarqué ces détails lorsqu’il se trouvait de l’autre côté de la porte, il avait d’autre sujets de désagrément aussi.
Il passait l’œil à travers chaque judas, mais il ne voyait que des frêles corps étalés sur les dalles glacées. Il passait donc de porte à porte jusqu’à ce qu’il entende des voix venant de derrière lui.

V.. vous, vous, vous êtes ceux dont parlaient les soldats!? Les évadés?? Sortez-moi de là, je vous, vous, vous en prie!

Le forgeron chercha son capitaine des yeux, mais il n’aperçut qu’une bande de tissu s’engouffrer dans la cellule voisine de celle d’où venaient les cris.
Il devait avoir trouvé Greev ! Il se préparait à lui emboiter le pas quand les suppliques des prisonniers redoublèrent.

Sortez-nous d'là! On s'débrouillera une fois sorti, promis! Nepel nous a enfermé ici juste parce qu'on protestait! C'est un tyran!

Comme pour mettre fin à leurs jérémiades, un cri strident retentit dans le couloir avant de laisser place au silence. Grisom profita de ces quelques instants de calme pour réfléchir. Libérer les prisonniers augmenterait encore le chaos qui régnait dans la base, mais ils pouvaient aussi décider de les attaquer pour leur voler leurs uniformes.
Le regard qu’il jeta dans la cellule le rassura et le poussa à leur ouvrir : même réunis, ils ne parviendraient surement pas à soulever un seul de ses marteaux. Il ouvrit en grand le battant et se posta entre les 2 cellules ouvertes.

« Allez-y ! Dépêchez-vous tant que les marines sont occupés, mais faites attention au deuxième étage : un des nôtre s’y amuse. » Dit-il avec un large sourire.

Si son visage était sympathique, le reste de son corps devrait décourager leurs envies belliqueuses. Quels condamnés affaiblis se frotteraient à une personne au large poitrail arborant 2 marteaux en fonte ?
Surtout en sachant que de nombreux marines fourmillaient dans les couloirs.

Très heureux de leur libération, les prisonniers fuirent sans demander leur reste! Néanmoins, l'un d'eux revint rapidement sur ses pas:

Merci! Merci beaucoup! Si vous vous en sortez, trouver la base de la résistance, c'est une ferme près de la plage! Nous vous rendrons la pareille !

Sur ces mots encourageants, il disparut.

Les bruits de bataille du deuxième semblaient s'être calmés, Greev était libre, bien qu'inconscient, et si Grisom et Jim voulaient s'en sortir sans problème, ils avaient toutes les raisons pour se hâter et quitter l'endroit!

Grisom regarda le dernier des prisonniers s’engouffrer dans l’escalier.

*La base de la résistance hein… Assez sympa en fait ces gars, il faudra que j’en parle à Jim.*
Il se dirigea ensuite vers la cellule, où son capitaine peinait à tirer la grosse carcasse inconsciente de Greev. Il resta quelques instants sur le pas de la porte, à le regarder se démener. Il n’avait pas eu l’occasion de voir beaucoup de choses marrantes ces temps-ci, mais le comique de cette situation suffit à lui faire oublier tous les derniers évènements désagréables.

« Cesse de me regarder comme un idiot et aide-moi à le porter !! »
Visiblement Hawkins n’avait pas un sens de l’humour très développé, mais ce n’était pas particulièrement grave ; le forgeron en avait assez pour 2 personnes… au moins. Chacun calé sous une aisselle odorante de l’homme poisson, ils parvinrent à l’endroit où Marco guettait nerveusement le couloir.

« Dépêchez-vous !! Les bruits d’combat sont pu là ! Faut s’magner d’se casser d’ici !! »
Le pirate voilé se tourna vers son congénère, faisant fi de la panique de la sentinnelle.
« Passe devant. Ouvre-nous un passage jusqu’aux cuisines. On sortira par où on est entré. »

La perspective d’en découdre avec les pions de la base ravit le jeune homme. Depuis qu’il était sortit de son cachot, il n’avait pas eu l’occasion de taper sur un seul d’entre eux, tant il était occupé par la sortie et sa faim. Mais maintenant, il n’y avait aucun obstacle à ce qu’il se lache totalement.
Il céda sa place à Marco et, par pure bravade, fit un salut militaire des plus corrects à son capitaine. Il se dirigea ensuite vers l’escalier d’un bon pas, laissant un peu de distance entre lui et ses protégés.

Il n’avait franchit que quelques marches quand des bruits de pas lui parvinrent, une patrouille se dirigeait dans sa direction. Un sourire se dessina sur ses lèvres, voilà l’occasion qu’il attendait. Il ne ressentait pas de peur ou d’anxiété, mais juste une chaleur qui se répandait par vagues dans tout son corps.
Au moment où les soldats apparurent, il se jeta d’un bond sur le premier d’entre eux et, par un coup d’épaule dans le plexus, l’envoya voler plus bas. La suite des évènements échappa à son contrôle. Il avait déjà participé à des bagarres de taverne et à celle contre les chasseurs de primes, mais aucune ne rivalisait en férocité avec celle-ci.
S’il avait gardé l’esprit clair et une capacité d’analyse minimum, il aurait jugé qu’il n’avait aucune chance de vaincre les soldats. Au nombre de 10, ils étaient tous munis de fusils et n'avaient pas la tête de novices. Mais cette chaleur au creux de son ventre balaya toute idée de danger et de prudence.

Heureusement pour lui, le couloir était étroit, empêchant les marines de l’affronter à plus de 2 ou de se servir de leurs fusils, au risque de blesser leurs camarades. Grisom quant à lui, s’en donnait à cœur joie. Il frappait partout, sans retenue, n’ayant aucune conscience des épaules qu’il brisait, des thorax qu’il écrasait ou des crânes qu’il fêlait. Il n’était qu’une tempête de fer et de chair, à ceci près qu’un rire tonitruant s’échappait sans interruption de sa gorge.
Il ne se calma que lorsque ses marteaux ne rencontrèrent plus que du vide. Tous les marines étaient au sol, un ou deux se permettant un râle de souffrance bien justifié. Il ne prit pourtant pas la peine de regarder ses victimes, l’adrénaline était encore trop présente pour qu’il reprenne ses esprits.
C’est donc sans réfléchir que, lorsqu’il entendit quelqu’un monter rapidement les escaliers, il se propulsa dans cette direction avant même de voir de qui il s’agissait.

Grisom venait de faire étalage de ses talents: l'apprenti forgeron savait très certainement se servir de ses marteaux, c'est en tout cas la conclusion qui vint à l'esprit de son camarade après ce déchainement de brutalité!

La troupe s'élança dans l'escalier, trainant toujours le corps inconscient de Greev. Si l'homme poisson était un poids mort pour eux, la silhouette que Grisom heurta sur les marches était tout le contraire: un être costaud et vif, dopé à la testostérone et ivre de combat. Hawkins se laissa surprendre, et un soupir retenu lui tint la gorge: l'animal était énorme, et avait un sourire carnassier. L'animal, c'était Lionfish, la rascasse!

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