Où est l'ANPE du coin ?

Arrivé à LogueTown depuis peu, il avait tout juste eu le temps de se promener dans la ville, se dessinant petit à petit une carte mentale de la ville pour s'y retrouver. Cela ne fut pas facile, la ville étant grande. Il y alla donc petit à petit, utilisant les sons et les bribes de vent qui lui parvenaient pour distinguer les rues et éviter de bousculer les passants.
Il lui fallut presque une journée entière pour traverser la cité en long en large et en travers. C'était fastidieux mais malheureusement nécessaire. Le vieil homme qu'il avait rencontré à son arrivée avait proposé de l'aider dans cette entreprise mais il avait refusé son aide, préférant s'entrainer à se débrouiller seul.
Les sons et odeurs aidaient aussi beaucoup. Le port sentait le poisson et l'océan et le bruit des mouettes ne laissait aucun doute à ce sujet. Le marché avait une forte odeur d'épices facilement repérable a plusieurs rues et le chahut qui y régnait était spécifique de cet endroit et de la grande place qui empestait le sang. Toujours est-il que maintenant il pouvait circuler assez facilement dans tout la ville.

Tour comme il l'avait fait avec les différents paysages dont il avait pu s'imprégner grâce aux descriptions que le vieil homme avait fait du coucher du soleil sur l'océan, les couleurs du marché, l'ambiance qui régnait sur la place ou Roger avait trouvé la mort, il avait dessiné dans son carnet une carte de la ville qui s'avéra très correcte d'après les dire de son hôte.

Heureusement pour lui, il s'était vu inviter sous le toit de son nouvel et unique ami. Les deux s'y retrouvaient ; Gabriel avait un toit au dessus de la tête et le vieil homme avait de la compagnie. Cependant il lui fallait trouver un moyen de gagner de l'argent, à la fois pour dédommager son hôte pour sa bienveillance et également pour financer son projet. Toutefois trouver d'un un travail qui pouvait être fait par lui malgré son handicap et de deux un patron acceptant de l'embaucher.
Francis avait demandé aux gens qu'il connaissait s'ils n'avaient pas un éventuel travail à pourvoir mais ce n'était pas le cas.

Pour commencer il fabriqua quelques affiches proposant ses compétences à qui en voudrait.
Sur celles-ci on pouvait lire :


Il avait volontairement omis de préciser qu'il était aveugle, pour ne pas décourager par avance un éventuel employeur. Il en accrocha une dans chaque auberge de la cité, ainsi que sur le mur extérieur de la maison de son hôte.
* Il n'y a plus qu'à attendre de voir si quelqu'un est intéressé ... *
Mais il ne comptait pas attendre sans rien faire. Il passait donc ses journées à errer dans la ville, demandant ci et là pour du travail. Il trouvait à l'occasion un marchand ayant besoin d'aide pour charrier des caisses de victuailles, mais ce n'étaient que des petits boulots occasionnels, rien de durable et qui plus est étaient mal payés.

* Patience ... *

Depuis quelques minutes déjà,il observait la démarche nonchalante du jeune homme. Après avoir discrètement lu, puis arraché une des affiches qu'avait placardé le chômeur dans la rue, il avait maintes fois essayé d'attirer son regard par un petit signe discret de la main. Cependant l'individu totalement imperméable à ses approches avait continué son chemin comme si de rien était. Ce comportement indubitablement contraire aux dires de l'affiche, ainsi que ces yeux un peu effrayants par leur étrangeté, lui avait mis la puce à l'oreille. Voyant un moyen d'utiliser le fruit de ces réflexions, le gamin d'humeur roublarde partit chercher en courant une brique dans un tas d'objets insolites qui servait de décharge aux habitants du quartier. Il la posa ensuite à un endroit stratégique bien précis; d'après ses calculs, le supposé malvoyant serait obligé d'y passer. Tout fier de sa future blague, le garçon se positionna dix mètres plus loin.

Comme prévu, il vit l'homme s'avancer tranquillement vers le piège si habilement tendu. Il n'avait aucune raison de l'avoir prévu, il avait bien prix garde à ne pas faire trop de bruits. Et, bien entendu, la foule pressée et affairée n'avait que faire de se préoccuper d'un pauvre aveugle à qui un tour serait joué.

Plus que 5 mètres, ..., 3 mètres, 3 pas, 2 pas, 1 pas et demi, ..., MAINTENANT!
Il inspira une grande bouffée d'air et ...

Attention m'sieur !! Si j'étais vous, je ne ferais pas un pas de plus !

La voix aigüe, qui se voulait bienfaitrice, prévient l'aveugle juste à temps.

Un gosse d'ici a essayé de se foutre d' vous. Vous avez d'la chance que chois passé par là. Entre cette brique et vot' pied, sauf vot' respect m'sieur, il est pas dur de savoir qui aurait gagné. J' l'ai vu préparé son coup de loin. Vous zavez d'la chance que j'trainais dans l'coin.

Il laissa passer un temps pour laisser la personne qu'il avait "sauvé" gober ses moitiés de mensonges et exprimer les éventuels remerciements qui en découleraient. Faut dire qu'il dirait pas non à une petite pièce.

Puis reprenant la fin de son discours d'entrée préraré,

Vous avez besoin d'aide ? Vous cherchez quelqu'un ? quèqu'chose ?
Y a pas grand monde qui peux se venter de connaître aussi bien la ville que moi !
Si quéqu'un peux vous zaider, c'est bien moi !

Il espérait bien que "l'étranger" comprendrait implicitement que ses services n'étaient eux pas gratuits.